Chai Lai Orchid

15 janvier 2014

Nous étions à 50km de Chang Mai, au nord de la Thaïlande. Alexa dirige Chai Lai Orchid, un "complexe touristique", au milieu de la jungle, depuis maintenant un an. J’étais "volontaire" dans ce complexe. Etant admiratif devant son histoire, son projet et les gens qui réalisent leurs rêves en général, je tenais à partager un morceau de nos discussions...

Moi: Peux-tu nous expliquer ton parcours depuis l'enfance?

Alexa: J'ai grandi dans une ferme aux Etats-Unis, à une heure de route au nord de New-York. J'ai quitté l'école à 17ans pour aller en Europe car quelqu'un m'avait dit que l'école était gratuite là-bas. Ma famille n'avait pas l'argent pour que je fasse des études aux USA alors je suis parti en Allemagne.

J'avais besoin d'argent aussi en Europe alors j'ai cherché du travail. Je suis tombé sur des gens qui m'ont fait croire que je pouvais travailler dans un hôtel... c'était en fait des personnes qui récupéraient des jeunes filles pour la prostitution. J'ai réussi à ne pas rentrer dans ce business et trouvé un travail en tant que femme de ménage, puis, dans une cuisine où j'étais cuisinière, c’est ce que je voulais faire depuis le début!

Je suis ensuite rentré aux Etats-Unis à 21ans et j'ai commencé mes études de "film et production" après avoir emprunté de l'argent à la banque. J'ai toujours pensé que l'éducation est la meilleure arme pour changer les choses, les films sont pour un bon moyen pour transmettre le savoir. J'ai alors travaillé dans l'industrie du film jusqu’à 28 ans, puis, pour une ONG (Daughter Rising). Le but de cette association est d'éduquer les gens au sujet du trafic de filles.

J’ai fait beaucoup de rencontres, notamment de filles qui avaient été vendue pour qu'elles se prostituent... J'avais envie de les aider. Je suis également tombée amoureuse de la Thaïlande... Alors j'ai réfléchi et créé le projet Chai Lai Orchid.

M: Est-ce que tu peux présenter Chai Lai Orchid?

A: C'est un "social-eco-tourism-business". On utilise l'argent des touristes pour des programmes sociaux dans les villages. On a aussi une maison pour volontaires qui viennent nous aider.

Dans les villages, on offre des tests HIV gratuits, des médicaments, on leur apprend des règles de base sur la santé, la grossesse et la vie en générale (que le viol est interdit, que les hommes ne doivent pas frapper les femmes...)

M: Tu es contente du projet alors, tu ne regrettes pas d'avoir quitté ton pays?

A: Je me sens comme chez moi ici. On peut dire que c'était un rêve pour moi de faire ce que je fais aujourd'hui. J'aime les gens, j'aime le pays... Pour l'instant je ne gagne pas d'argent, je vis dans cette cabane. Un jour, quand tout sera en place, peut être que je pourrai gagner de l'argent et m'acheter une petite maison avec un jardin, mais ce n'est pas la priorité.

M: Les filles qui travaillent ici avec toi sont elle issues de la prostitution?

A: Certaines, oui. Et la plupart des hommes ont également un passé compliqué. Cela fait parti du programme. B par exemple vient de Birmanie. Avant d'être ici, il n'avait jamais connu un seul jour de repos. Il vivait avec la peur que la police l'arrête et l'emmène en prison.

M: Pourquoi?

A: Il fait parti d'une "ethnic minority" (Karen), en Birmanie, ils sont poursuivis car ils auraient collaboré avec les anglais pendant l'époque coloniale. Il est déjà allé en prison, les policiers lui on brulé toutes ses affaires devant lui. Heureusement, un ami à lui a payé pour qu'il puisse en sortir...

M: Ok, c'est difficile d'imaginer tout ca pour moi, mais je comprends... Tu parlais hier de la façon dont les mafias récupéraient les filles en Thaïlande, peux-tu me réexpliquer?

A: C’est souvent la même histoire, en Thaïlande et ailleurs. Pour mon cas, en Europe, une vielle femme m'avait dit que je pourrais travailler dans un café et m'occuper des enfants des propriétaires. Elle m'a emmené en voiture, très loin, jusqu'en Autriche je crois. Je me suis retrouvé avec beaucoup de filles, pour la plupart d Europe de l'est. Ensuite, ils m’ont pris mon passeport et mes vêtements... Ici c'est pareil, elles n'ont pas d'argent alors on leur fait croire qu'elles peuvent travailler dans un zoo avec des tigres, dans un café, dans des familles d'occidentaux... Quand tu es jeune et que tu espères un meilleur avenir, c'est facile d'accepter ce genre de proposition.

PS:

Si vous voulez passer des vacances en Thaïlande du nord et contribuer à ce projet, voici le lien du site.

http://chailaiorchid.com/